Frida Kahlo (1907-1954)

¡ Cuán hermosa era Frida, a través de sus ojos dolorosos ! ¡ Cuán hermosa… ! Los otros pasaron a la posteridad con su patronímico. Ella nos regaló su nombre, Frida, y toda su persona fue un regalo para nosotros. Pintó sus lágrimas y sus quebrantos, sus accidentes, un tranvía y Diego, se pintó a sí misma, por fuera y por dentro porque era, según decía, el tema que mejor conocía. Pintó de colores sus nubes y sus duelos, hizo florecer sus desiertos y se resucitó tantas veces que al fin y al cabo, nunca murió de verdad. Desgarrada, abrió sus alas, comme una primera y eterna respiración : debía llenarse de colores o romperse para siempre.

Pies, no son tan necesarios para quien tiene como ella, alas para volar ; innecesaria resulta esa pierna, inerte y dolorosa, para quien tiene pinceles que, como alas de mariposa, rozan el lienzo para susurrarle historias o, como puñales encolerizados, lo despedazan. Aquí estaba Frida, rota y esparcida, como un pájaro desplumado, por tierra.

Frida, Frieden, la paz que esperaba… Deseaba acabar con sus noches, vivir sus días y renacer de su propia oscuridad. Si la felicidad es un privilegio otorgado a pocas personas, ella no era una de ellas, Pero se sembró a los cuatro vientos, a los cuatro rincones del mundo, antes de llegar al final del camino que tenía que recorrer, antes de que el espeso silencio la rodeara, antes de que se ahogaran sus gritos y se hiciera ausente a sus propios dolores. Indiferente… « Espero que sea alegre la salida y espero no volver jamás. »¡ Viva la vida !

Véronique RAMOND

Comme elle était belle, Frida, dans ses yeux de souffrance. Comme elle était belle... Les autres sont passés à la postérité avec leur patronyme. Elle, nous a offert son prénom, Frida, comme elle s'est offerte toute entière. Elle a peint ses larmes et ses déchirures, ses accidents, un tramway et Diego, elle s'est peinte, en dehors et en dedans, parce qu'elle était, disait-elle, le sujet qu'elle connaissait le mieux. Elle a peint en couleurs ses grisailles et ses deuils, a fait fleurir ses déserts et s'est ressuscitée tant de fois qu'au fond, elle n'est jamais morte vraiment. Déchirée en deux, elle a déployé ses ailes, comme une première et éternelle respiration : elle devait se remplir de couleurs ou se briser à jamais.

Nul besoin de pieds lorsqu'on a, comme elle, des ailes pour voler, nul besoin de cette jambe, désespérément inerte et douloureuse, lorsqu'on a des pinceaux qui, comme des ailes de papillons, viennent frôler la toile pour lui murmurer des histoires ou, comme des poignards emplis de colère, la déchiquetent. Elle était là, Frida, fracassée et éparpillée comme un oiseau déplumé, à terre.

Frida, Frieden, la paix qu'elle attendait... Elle aurait voulu mettre fin à ses nuits, vivre ses jours et renaître de sa propre obscurité. Si le bonheur est un privilège accordé à un petit nombre, elle n'en faisait pas partie. Mais elle s'est semée aux quatre vents, aux quatre coins du monde, avant d'arriver au bout du chemin qui lui était destiné, avant que le silence ne s'épaississe autour d'elle, avant que ses cris ne s'étouffent et qu'elle ne devienne absente à ses propres douleurs. Indifférente... "J'espère que la sortie sera joyeuse, et j'espère ne jamais revenir". Vive la vie.

Véronique RAMOND